Quel est le problème actuel d’Ethereum ?
Alors que le cours de l’Ether ne cesse de baisser et que les frais de transaction sont au plus bas, la blockchain Ethereum traverse une crise existentielle et se pose des questions sur la place qu’elle doit occuper dans le futur, et l’intérêt des layer 2 à son égard.
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Où en est-on au sein de l’écosystème Ethereum ?
Alors que le marché des cryptomonnaies vit une période difficile, la blockchain Ethereum voit le cours de l’Ether, sa cryptomonnaie, chuter plus drastiquement que celui des autres cryptomonnaies les plus capitalisées comme Bitcoin ou le SOL de Solana.
Evolution du cours depuis 1er janvier 2024 | Evolution du cours depuis 1er juin 2024 | |
Ethereum | +0,02% | -40,85% |
Bitcoin | +27,72% | -20,15% |
Solana | +23,76% | -24,69% |
Même si de nombreux facteurs macroéconomiques influencent cette chute, des inquiétudes ont émergé ces dernières semaines alors même que le lancement des ETF spot le 23 juillet n’a pas permis de relancer une dynamique haussière pour l’Ether. Pire, depuis le lancement des ETF, le cours de l’ETH a perdu près de 20%.
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Depuis la mise à jour The Merge introduite au mois de septembre 2022, qui a fait passer Ethereum de la preuve de travail (PoW) à la preuve d’enjeu (PoS), l’Ether affiche une sous-performance de 44 % par rapport au BTC. À l’heure de l’écriture de ces lignes, la paire ETH/BTC est à un prix de 0,0405 BTC pour 1 ETH.
Ouvrir un compte sur Binance, la plateforme crypto n°1 au mondePourquoi le cours de la cryptomonnaie d’Ethereum chute-t-il ?
Depuis l’approbation des ETF Ethereum spot, Grayscale a vendu pour près d’1,2 millions d’ETH. D’autres acteurs ont également vendu de l’ETH en masse, comme Jump Crypto qui a vendu pour 400 000 ETH et Paradigm qui en a vendu 60 000.
Du côté de la demande, les ventes n’ont pas toutes été absorbées, même si BlackRock contrebalance tant bien que mal avec près de 350 000 ETH achetés depuis l’approbation des ETF spot.
Depuis la mise en place de l’EIP-1559, une mise à jour d’Ethereum permettant d’agrandir provisoirement l’espace des blocs en cas de forte activité, une partie des frais de transaction (en Ether) sont brûlés, alors que jusqu’ici l’intégralité de ces derniers étaient versés aux mineurs.
Ainsi, avec une forte utilisation du réseau Ethereum, l’Ether devenait déflationniste. Plus le réseau était utilisé, plus la quantité d’Ethers brûlés était supérieure à celle de nouveaux Ethers créés et ajoutés à la supply en circulation.
Depuis The Merge, plus de 1,7 million d’ETH ont été brulés et un peu plus de 1,5 million d’ETH ont été créés, ce qui constitue une baisse du nombre d’Ethers en circulation d’environ 200 000. Cependant, depuis quelques mois, face à la baisse d’activité du réseau Ethereum et des frais de transaction, la tendance s’est complètement inversée.
Ainsi, sur les 30 derniers jours, seuls 7 800 ETH ont été brûlés alors que plus de 77 000 ont été créés. C’est ainsi que le nombre d’Ethers en circulation a atteint son plus haut niveau depuis mai 2023. Cela ajoute une pression supplémentaire à la vente.
Pourquoi le réseau Ethereum connaît-il une baisse d’activité ? Cela provient de la multiplication des réseaux de seconde couche, appelés layer 2, qui permettent de réaliser des transactions à des coûts réduits. Ainsi une partie des utilisateurs de la blockchain Ethereum ont migré vers ces nouveaux réseaux pour de nombreuses raisons que nous étayerons dans la suite de l’article.
Ne ratez pas le bullrun, rejoignez nos experts sur Cryptoast AcademyComment se fait-il que la blockchain Ethereum génère moins d’activité et de frais (de transaction) ?
Le 13 mars 2024, la mise à jour Cancun-Deneb aussi connue sous d’autres noms comme Dencun, EIP-4844 ou Proto-Danksharding, a introduit le concept de blobs.
Un blob est un espace dédié rattaché à chaque bloc qui permet de stocker les données des transactions effectuées sur les layer 2. Cet espace spécifique est, au bout de quelques semaines, supprimé de la blockchain Ethereum, ce qui permet de ne pas l’alourdir.
Schématisation du fonctionnement des blobs sur Ethereum
Alors qu’auparavant les layer 2 devaient entrer en compétition avec les utilisateurs du réseau Ethereum pour y inscrire leurs historiques de transaction, ils disposent désormais d’un espace réservé. Cela a fait diminuer fortement les frais de transactions sur le réseau principal, puisque les frais payés par les layers 2 à Ethereum ont baissé de 99% en 1 an.
Évolution des frais récoltés par les layer 2 et reversés à Ethereum d’après growthepie
En décembre 2023, le layer 2 Arbitrum a payé plus de 9 millions de dollars de frais pour inscrire ses transactions sur Ethereum. Sur les 30 derniers jours, il n’a versé qu’un peu plus de 44 000 dollars !
Voici un tableau comparant les montants payés en décembre 2023 par rapport aux 30 derniers jours pour les principaux layer 2 :
Layer 2 | Frais payés en décembre 2023 | Frais payés les 30 derniers jours |
Linea | 10,2 millions $ | 2 700 $ |
Scroll | 3 millions $ | 40 400 $ |
Base | 2 millions $ | 7 000 $ |
Optimism | 4,1 millions $ | 4 300 $ |
zkSync | 5,9 millions $ | 11 000 $ |
Arbitrum | 9,3 millions $ | 44 400 $ |
Néanmoins, cette baisse des montants payés par les L2 à Ethereum a été une bonne chose pour les utilisateurs, puisque les frais de transaction sur les réseaux de seconde couche ont connu de très fortes baisses.
Baisse des frais sur les layer 2 d’après growthepie
Cela a aussi augmenté la rentabilité de ces layer 2, puisque ces derniers payent beaucoup moins de frais à Ethereum pour y intégrer leurs transactions. De fait, ils peuvent récupérer une marge sur les coûts de transactions payés par les utilisateurs sur les L2.
Layer 2 | Profit janvier 2024 | Profit février 2024 | Profit mars 2024 (Dencun) | Profil avril 2024 |
Linea | 1,1 million $ | 4,7 millions $ | 13,4 millions $ | 1,9 million $ |
Scroll | 702k $ | 1,8 million $ | 3,6 millions $ | 3,2 millions $ |
Base | 460k $ | 927k $ | 16,6 millions $ | 12,8 millions $ |
Optimism | 818k $ | 45k $ | 1,1 million $ | 2 millions $ |
zkSync | 1,8 million $ | 1,4 million $ | 1,6 millions $ | 634k $ |
Arbitrum | 2,6 millions $ | 2,1 millions $ | 2,5 millions $ | 2 millions $ |
Layer 2 | Profit mai 2024 | Profit juin 2024 | Profit juillet 2024 | Profit août 2024 |
Linea | 610k $ | 648k $ | 862k $ | 382k $ |
Scroll | 1,4 million $ | 628 k $ | 930k $ | 362k $ |
Base | 6,9 millions $ | 4 millions $ | 3,1 millions $ | 2,5 millions $ |
Optimism | 1,5 million $ | 1,4 million $ | 1,4 million $ | 943k $ |
zkSync | 460k $ | 251k $ | 172k $ | 130k $ |
Arbitrum | 782k $ | 4,1 millions $ | 903k $ | 2,2 millions $ |
Afin de savoir si la baisse des profits est liée à une baisse d’activité, observons l’évolution du nombre de transactions sur les L2 entre janvier et août.
Layer 2 | Transactions janvier 2024 | Transactions août 2024 |
Linea | 6,9 millions | 12,8 millions |
Scroll | 4,9 millions | 8,6 millions |
Base | 11 millions | 122 millions |
Optimism | 12,5 millions | 17,6 million |
zkSync | 43,6 millions | 7,2 millions |
Arbitrum | 39,2 millions | 67,2 millions |
Ainsi, Arbitrum voit ses profits diminuer entre janvier et août alors que le nombre de transactions est multiplié par 1,7.
En parallèle, on constate une augmentation par un facteur de 9 des profits de Base en août par rapport à janvier avec une multiplication par 11 de son nombre de transactions.
En revanche, pour Linea, nous observons une baisse des profits de 65 % en août en comparaison à janvier, tandis que dans le même temps le nombre de transactions a progressé de 86 %.
Tous les layers 2 ne sont pas égaux, ils se challengent continuellement afin d’avoir les frais les plus compétitifs et attirer les utilisateurs. D’autres layer 2 voient leurs profits inférieurs à ceux que l’on pouvait observer avant la mise à jour Dencun, notamment ceux qui connaissent une baisse d’activité comme zkSync, souvent suite à un airdrop.
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Mais cette baisse est aussi visible chez ceux pour qui la baisse des frais a été la plus importante, comme Linea qui passe d’un coût de transaction moyen de 0,37 dollar en janvier à 0,01 dollar en août, et qui n’ont pas une activité on-chain permettant de compenser cette perte.
La multiplication des layer 2, initialement conçus dans l’objectif de désengorger le réseau principal, a fragmenté la liquidité initialement présente sur Ethereum. De nombreux utilisateurs ont migré vers ces réseaux de seconde couche pour plusieurs raisons :
- meilleurs rendements ;
- promesse d’airdrop (distribution gratuite de cryptomonnaies) ;
- utilisation de protocoles non disponibles sur le layer 1 Ethereum.
Comment est fragmentée la liquidité d’Ethereum ?
D’après DefiLlama, la TVL (valeur déposée dans des projets) cumulée des L2 mentionnés plus haut s’élève à environ de 6 milliards de dollars, ce qui représente tout de même 15 % de la TVL d’Ethereum.
Sur les 6 réseaux de seconde couche étudiés, ce sont plus de 9 milliards de dollars en ETH qui sont hébergés sur leurs protocoles et pas sur le réseau principal, d’après L2BEAT.
Mais les layer 2 ne sont pas la seule raison de la baisse d’utilisation du réseau.
Le développement du staking (le fait de verrouiller des cryptomonnaies pour participer à la sécurisation du réseau) et l’émergence du restaking génèrent le blocage d'une partie importante des ETH.
Des protocoles comme Lido, Rocket Pool et d’autres encore ont créé des LST (liquid staking tokens) qui représentent un ETH staké. Lorsque vous déposez 1 ETH sur Lido, vous recevez 1 stETH que vous pouvez utiliser dans la DeFi ou au sein du réseau Ethereum.
A l’heure actuelle, d’après Dune, plus de 34 millions d’ETH sont stackés, ce qui représente 28% du total des Ethers disponibles.
Cependant, avec l’apparition du restaking, une partie de ces LST ont été restakés, ce qui a encore davantage diminué la liquidité de ces tokens.
Sur environ 10 millions de stETH, donc d’Ethers stakés sur Lido, près de 1,3 million sont en restaking sur EigenLayer ou Symbiotic, ce qui représente 13% de stETH totalement illiquides.
Coinhouse : la plateforme crypto française la plus réputéeVitalik Buterin et la Fondation Ethereum sous le feu des critiques
Alors que le cofondateur d’Ethereum Vitalik Buterin a partagé l’idée que la finance décentralisée dans sa forme actuelle n’est pas soutenable à long terme, de nombreuses critiques se sont abattues sur lui. Cette sortie contre la finance décentralisée n’a pas été comprise par une partie de la communauté, et ce alors que des protocoles commencent à générer des revenus de manière viable comme Aave, Maker ou Lido.
Vitalik, critiqué pour investir dans des projets non alignés avec le développement d’Ethereum, ne prévoit plus d’investir dans de nouvelles startups qui pourraient lui valoir de nouvelles critiques de cet ordre. Il prévoit également de faire don de ses gains issus de précédents investissements, comme ceux issus du layer 2 Starknet.
Le cofondateur d’Ethereum n’a pas été le seul à être pointé du doigt Une partie de la communauté critique les ventes de l’Ethereum Foundation sur des CEX comme Kraken, ce qui ajouterait une pression vendeuse constante. En effet, le 23 août, 35 000 ETH d’une valeur de 94 millions de dollars avaient été déposés sur Kraken par la fondation.
De plus, les gens se questionnent sur l’utilisation des fonds générés par ces ventes et sur les processus de décisions de la Fondation pour l’attribution des fonds. L’utilisation des fonds est-elle vraiment alignée sur les objectifs de développement d’Ethereum ?
Dans un souci de transparence, l’Ethereum Fondation a annoncé émettre un rapport visant à faire la lumière sur les raisons derrière ces mouvements de fonds.
Ethereum Foundation to release financial report, holds roughly $650 million in main wallet: Justin Drake https://t.co/MZLzmAfxR4
— The Block (@TheBlock__) September 6, 2024
La situation d’Ethereum est-elle désespérée ?
Actuellement, 74 layer 2 sont en fonctionnement d’après le site L2BEAT, et des centaines sont en testnet.
De grosses entreprises lancent leurs propres L2, comme Sony qui ne compte peut-être pas générer de la rentabilité directe avec son réseau baptisé « Soneium » grâce aux frais collectés. Ces L2 soutenus par de grosses entreprises pourraient se permettre de payer des frais de gas « importants » à Ethereum, et la concurrence entre ces L2 pourrait permettre de générer davantage d’innovation et de bénéficier à Ethereum.
👉 Lancez-vous sur Soneium pour toucher un airdrop
Est-ce que le fait d’avoir davantage de L2 permettra à Ethereum de gagner plus de frais ? Pas forcément…
À partir de 3 blobs remplis par bloc, les frais augmentent, ce qui devrait arriver de manière croissante en prochaine phase haussière avec tous les nouveaux layer 2 qui se lanceront.
Cependant, lors de phases avec de nombreuses transactions sur les L2, comme cela avait pu être observé lors de l’airdrop de LayerZero, les layer 2 auraient limité les inscriptions de leurs transactions dans les blobs pour ne pas dépasser cette limite et voir les frais augmenter. Ou alors, utiliser l’espace des blocs classiques (call data) pour y poster leurs transactions (si le coût est inférieur à celui des blobs).
Pourquoi les frais reviennent-ils aux équipes qui développent les L2 ? Parce que les séquenceurs, qui sont chargés de récupérer les transactions effectuées sur un L2 pour les poster sur Ethereum, sont centralisés et appartiennent aux équipes de développement des layer 2. Cela implique des risques importants en termes de centralisation et de censure.
Mais cela pourrait changer avec l’apparition de séquenceurs décentralisés et de « based rollups ». Les premiers permettraient de limiter l’impact de la centralisation des séquenceurs dans l’organisation des transactions et de la capture de la MEV. Les based rollups quant à eux, permettraient de gérer le séquençage au niveau d’Ethereum et ainsi de récupérer les frais sur son réseau.
Le développement de nombreux réseaux de seconde couche a complexifié l’expérience utilisateur avec l’utilisation de bridges, de wrapped tokens et d’autres choses encore, ce qui a pu faire fuir une partie des utilisateurs. Cette expérience tend à être simplifiée avec les intents et les solvers, cependant, cela a tendance à centraliser et à rendre l’expérience opaque pour les utilisateurs au profit des market makers.
Même si la majorité des utilisateurs seront présents sur des L2, il y a toujours la nécessité de disposer d’ETH pour payer les frais de transaction, ce qui donne toujours une pression acheteuse et un intérêt pour le token. Cependant, est-ce que cela sera encore le cas dans le futur ? Les L2 voudront certainement donner davantage d’utilité à leurs tokens qu’un droit de gouvernance, ou améliorer l’expérience utilisateur en permettant de payer ses frais de gas avec n’importe quel token.
Ethereum sera un réseau utilisé par les institutionnels qui ont besoin d’une « réelle » décentralisation et de sécurité pour réaliser des transactions de plusieurs millions de dollars sur une infrastructure fiable. Ils seront prêts à payer des frais en dizaines de dollars, car cela restera toujours plus faible que dans le système financier traditionnel. Le développement des real world assets (RWA), ces biens du monde réel tokénisés, pourraient ainsi devenir le salut d’Ethereum.
👉 Nos explications complètes sur les real world assets (RWA)
Est-ce qu’Ethereum devrait augmenter son débit de transaction afin de diminuer les frais sur son réseau principal ? Il est peu probable que cela arrive, car cela remettrait en question le trilemme de la blockchain et le fait qu’il n’est pas possible de concevoir un réseau à la fois décentralisé, rapide et sécurisé.
De plus, est-ce que cela pousserait les L2 à « collaborer » avec Ethereum alors que cela pourrait signer leur fin ?
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Les investissements dans les crypto-monnaies sont risqués. Il n’existe pas de rendement élevé garanti, un produit présentant un potentiel de rendement élevé implique un risque élevé. Cette prise de risque doit être en adéquation avec votre projet, votre horizon de placement et votre capacité à perdre une partie de cette épargne. N’investissez pas si vous n’êtes pas prêt à perdre tout ou partie de votre capital
Bravo pour le boulot de synthèse et d'explication. C'est rare de trouver des articles comme ça en français.