Qu'est-ce que la finance décentralisée (DeFi) ? Définition et explication

Longtemps entre les mains de banques institutionnelles, la finance vit depuis quelques années un changement profond. Celui-ci passe par l'arrivée massive des particuliers sur les places de marchés et l’apparition de la finance décentralisée (DeFi), laquelle marque le début d’une nouvelle ère de la finance. Découvrons ensemble ce qu’apporte la finance décentralisée et comment celle-ci fonctionne avec les cryptomonnaies.

Qu'est-ce que la finance décentralisée (DeFi) ? Définition et explication

C'est quoi la DeFi, ou finance décentralisée ?

La finance dans le monde centralisé

Historiquement, la finance est un domaine géré par les banques et quelques acteurs institutionnels. Les particuliers peuvent y déposer leur argent afin de générer des rendements grâce à divers mécanismes. Depuis quelques dizaines d’années cependant, les particuliers commencent à être de plus en plus impliqués, signe clair qu’un changement de paradigme est en cours.

Ainsi, les banques sont à l’heure actuelle considérées comme des facilitateurs ou intermédiaires. Celles-ci se chargent de sécuriser les fonds et d’effectuer les ordres à la place du particulier.

De par le nombre important d’intermédiaires, une simple transaction par carte bancaire auprès d’un commerçant peut endurer jusqu’à 3,5 % de frais. Et ce, dès que vous achetez un article en ligne ou en magasin. On commence à voir où la finance décentralisée pourrait intervenir.

👉 Pour aller plus loin – Doit-on déserter nos banques traditionnelles au profit de la finance décentralisée ?

L’arrivée de la finance décentralisée (DeFi)

Entre intermédiaires trop nombreux, frais élevés, manque de souveraineté, nombre de nouveaux problèmes sont pointés du doigt à mesure que le temps passe. Les épisodes catastrophiques tels que la crise financière de 2007-2008 ne faisant qu’empirer les choses.

L’arrivée de la blockchain en 2009 avec Bitcoin fait survenir l’espoir d’un changement imminent. Il faudra cependant attendre mi-2019 pour que la finance décentralisée émerge véritablement et attire des utilisateurs de façon notoire.

Cette finance décentralisée ou DeFi, fonctionnant sur la blockchain, signe le renouveau de la finance traditionnelle. En effet, l’utilisation des technologies de la blockchain et des smart contracts permettent aux particuliers d’avoir accès aux services financiers 24h/24h, 365 jours par an, et ce, en maintenant la main mise sur leurs fonds. Ainsi, avec la DeFi, la plupart des intermédiaires sont supprimés, et donc, les frais sont également réduits, les smart contracts permettant une interaction directe entre acheteurs et vendeurs.

De plus, l’utilisation de la blockchain garantit qu’aucune personne unique ne pourra bloquer les fonds d’autrui. Pour faire simple, la DeFi est une évolution de la finance traditionnelle dans laquelle n’importe qui, et ce, peu importe sa situation personnelle, peut avoir accès à des services financiers à faibles coûts et en gardant la main mise sur ses fonds.

Les services actuels proposés par la DeFi

La période de 2019 à 2022 fut extrêmement prolifique pour l’écosystème de la finance décentralisée. La valeur totale verrouillée (TVL) sur les différents protocoles est passée de 0 dollar à près de 100 milliards de dollars en août 2022. En d’autres termes, il y a, à l’heure d’écriture de ces lignes, presque 90 milliards de dollars déposés dans des protocoles et applications proposant des services financiers décentralisés. En décembre 2021, ce chiffre a même atteint les 250 milliards de dollars, et ce, en moins de 3 ans d’existence !

defi tvl

Figure 1 : L’évolution fulgurante de la valeur totale verrouillée en DeFi

 

Ainsi, il existe aujourd’hui de très nombreux services proposés par de multiples protocoles et applications. Voici une liste non exhaustive comprenant les services les plus matures et les plus utilisés dans la DeFi :

  • Les transactions financières classiques telles que le trading ou l’envoi/réception de fonds ; 
  • Les exchanges décentralisés (DEX), plateformes sur lesquelles vendeurs et acheteurs sont mis en relation afin d’y échanger des actifs ;
  • Les portefeuilles complets, semblables aux banques, avec de nombreux services financiers intégrés et des connexions directes à plusieurs blockchains ; 
  • Des « stablecoins » ou cryptomonnaies appairées à des valeurs stables telles que le dollar ou l’euro. Ils permettent aux utilisateurs d’accéder à tous les services proposés avec des monnaies non volatiles ;
  • Des services de lending/borrowing, permettant le prêt et l’emprunt d’actifs de façon décentralisée et sans justificatifs quelconques ;
  • Le « yield farming », une activité complexe et semi-automatisée qui consiste à trouver des stratégies combinant plusieurs protocoles afin de décupler les rendements ; 
  • Des « flash-loans », ou emprunts éclairs, permettant à des utilisateurs d’emprunter de très larges sommes d’argent à très faible collatéralisation. Cette somme est ensuite utilisée dans une stratégie éclair comportant de nombreuses transactions (comme l’arbitrage), puis remboursée au protocole. Et tout ça, dans un seul bloc.

Les principaux acteurs de la DeFi

Bien que l’un des objectifs de la DeFi soit de supprimer les intermédiaires, cela ne veut pas dire que le nombre d’acteurs s’en retrouve réduit. En effet, la concordance de plusieurs gros acteurs est nécessaire afin de faire de ce concept une réalité.

Les blockchains, fondations indispensables de la DeFi

Le passage d’une finance fondée sur la confiance, encombrante, discriminante et coûteuse, à une finance diamétralement opposée, ne se fait pas en un claquement de doigts. Le changement doit être profond.

La technologie de la blockchain permet de résoudre la grande majorité de ces problèmes. Sa nature décentralisée permet la suppression du modèle de confiance et de la souveraineté de chaque utilisateur. De plus, les méthodes de consensus avancées combinées aux smart contracts impliquent que les services financiers peuvent être automatisés et accessibles en permanence en toute sécurité.

À l’heure d’écriture de ces lignes, de nombreuses blockchains proposent un écosystème de DeFi florissant. Parmi celles-ci, on retrouve les suivantes :

  • Ethereum (ETH) ;
  • Avalanche (AVAX) ;
  • Polygon (MATIC) ;
  • Solana (SOL) ;
  • Fantom (FTM).

 

defi distribution

Figure 2 : Répartition des fonds bloqués en DeFi en juillet 2022

Les protocoles de DeFi, hubs des services financiers

Cependant, aussi performantes que les blockchains soient, elles sont excessivement mauvaises sur un point : l’interface utilisateur. Les protocoles de la DeFi sont des applications décentralisées (dApps) complexes permettant à leurs utilisateurs d’accéder simplement aux services qu’ils proposent. En arrière-plan, ces protocoles sont alimentés par des smart contracts, ou programmes immuables automatisés, qui se chargent de répondre aux requêtes utilisateurs.

Il existe des milliers de protocoles proposant des centaines de services différents sur toutes les blockchains accueillant la DeFi. Quelques-uns d’entre eux sont présentés ci-dessous.

MakerDAO, une banque centrale décentralisée

MakerDAO, le protocole le plus valorisé du marché à l’heure de l’écriture de ces lignes, propose tous les services financiers classiques que propose une banque. On peut y emprunter ou prêter des fonds grâce à son application Oasis. Le produit phare de MakerDAO est le DAI, le stablecoin décentralisé avec la plus importante capitalisation.

👉 En savoir plus sur le fonctionnement de MakerDAO et de son stablecoin DAI

Uniswap, une place de bourse sur la blockchain

Uniswap est le plus gros exchange décentralisé (DEX) des blockchains compatibles avec l’Ethereum Virtual Machine (EVM). Ce protocole permet à ses utilisateurs d’échanger plusieurs cryptomonnaies, en permanence, sans intermédiaires et de façon décentralisée. L’utilisation d’un teneur de marché automatisé permet aux acheteurs et aux vendeurs de se trouver sans carnet d’ordre ou place centrale, et la liquidité est apportée par d’autres utilisateurs.

💡Retrouvez notre fiche complète sur le DEX Uniswap

Aave, les banques privées sous stéroïdes

Aave est le marché de liquidités le plus valorisé. Il joue le rôle d’une banque internationale. Avec ce protocole, il est possible de prêter ou d’emprunter des fonds de manière décentralisée et automatique et sans vérification de crédit.

👉 Découvrez la plateforme Aave et le fonctionnement de sa banque décentralisée

Curve, un bureau de change décentralisé

Curve peut être considéré comme un bureau de change. En effet, on peut y convertir en très large quantité les cryptomonnaies les plus stables du marché. Cela va des plus importantes comme Bitcoin et Ether aux stablecoins adossés au dollar, à l’euro ou autres.

D’autres acteurs d’infrastructure, nécessaires au fonctionnement global

Au-delà de la blockchain et des protocoles, d’autres infrastructures sont indispensables au bon fonctionnement de la DeFi. Parmi eux, on retrouve les oracles comme Chainlink ou Band Protocol. En effet, la blockchain fonctionne sans recourir à la confiance. Mais alors, comment un exchange décentralisé récupère-t-il l’information concernant le prix des actifs qu’il propose à ses utilisateurs (cryptomonnaies, actions tokenisées, etc.) ?

Dans la finance traditionnelle, on s’appuie sur des entités centralisées telles que les banques, impossible en DeFi. C’est là que les oracles entrent en jeu. Ils permettent aux applications dites « on-chain » (hébergées sur la blockchain) d’avoir accès à des données « off-chain », du monde réel, et ce, sans intermédiaire et de façon décentralisée. Ce service peut également être étendu aux données on-chain. Il est par exemple possible de connaitre le prix de l’Ether en agrégeant les valeurs de plusieurs DEXs.

👉 En savoir plus sur Chainlink et la technologie des oracles

De plus, comment faire si nos deux applications préférées sont sur deux blockchains différentes et qu’elles utilisent des technologies différentes ? Les bridges décentralisés comme Wormhole, WBTC ou Hop permettent aux utilisateurs de transférer leurs fonds d’une blockchain à une autre. Cela remplace en quelque sorte les virements SWIFT ou SEPA entre les différentes banques.

defi map

Figure 2 : Aperçu de l’écosystème de la DeFi sur Ethereum en 2021

Quels sont les risques et freins à l’adoption de la DeFi

Les risques inhérents à la DeFi

Trop souvent, la finance décentralisée est décrite par ses acteurs comme étant l’eldorado des investisseurs. Bien que la majorité de ces vertus soient valables, il est important de savoir que la DeFi hérite des risques associés à sa technologie.

En effet, la suppression d’intermédiaires implique que la seule autorité, c’est le code source des protocoles. Ainsi, comme toutes applications, elles peuvent-être les cibles d’attaques ou de hacks majeurs. Ce phénomène est décuplé dans la DeFi de par la présence de très larges sommes d’argent

Certains sites, comme la Rektdatabase, traquent ces attaques. À l’heure de l’écriture de ces lignes, près de 4,6 milliards de dollars ont été volés par des hackers. C’est une somme importante qui débouche sur le deuxième plus gros risque de la DeFi : la non-protection du consommateur.

Sur ce même site, on apprend que seuls 1 milliard de dollars ont été rendus aux personnes affectées. Il n’existe à ce jour aucune solution viable permettant de protéger les utilisateurs d’éventuels hacks ou scams intervenant sur la blockchain. Les quelques assurances décentralisées exerçant en DeFi sont soit inefficaces, soit non sécurisées (l’assurance décentralisée Nexus Mutual s’étant fait hacker en décembre 2020).

À ces risques peuvent également venir s’ajouter la perte impermanente lors de participations à certains protocoles de DeFi ou le risque fiscal lié au manque de régulations.

defi hack scam juillet 2022

 

Figure 4 : Cumul des hacks et attaques dont a été victime la DeFi depuis juin 2016

Les freins à l’adoption de la DeFi

Comme toute nouvelle technologie, tout n’est pas tout rose. Et pour cause, certains aspects de la DeFi peuvent en repousser plus d’un, causant un sérieux frein à la future adoption de la DeFi.

Parmi eux, la surcollatéralisation. En effet, pour accéder aux services de prêt et emprunt décentralisé, il est nécessaire de surcollatéraliser sa position. Par exemple, si je veux emprunter 1000 $, il me faudra bloquer un montant supérieur à cette somme en une autre cryptomonnaie.

Comme il n’y a pas de vérification du passé financier de l’utilisateur, cette étape est nécessaire. De plus, lorsque la valeur des actifs verrouillée passe en dessous de celle des actifs empruntés, la position est liquidée. Ce problème est inhérent à l’automatisation et au manque d’intermédiaire dans les services financiers proposés par la DeFi.

De plus, ces prêts sont bien souvent à taux variables. Mais contrairement à la finance traditionnelle, ils varient en permanence de manière algorithmique selon l’offre et la demande. Ainsi, il est commun de voir ses taux augmenter ou diminuer de plusieurs points en l’espace de quelques jours ou semaines seulement.

Pour finir, il est souvent préférable d’utiliser les protocoles contenant le plus de liquidité. Le problème étant que ces applications sont hébergées sur Ethereum, une blockchain qui sature à chaque pic d’activité. Comme les frais de transactions ne dépendent pas de la somme envoyée, certains utilisateurs devront payer plus en frais que ce qu’ils investissent. Ce problème vient s’ajouter à la lenteur de la blockchain Ethereum et ses 15 transactions par seconde. Toutefois, de nombreuses solutions ont vu le jour pour résoudre ces limites, notamment les layer 2.

Le futur de la finance décentralisée

La DeFi est un concept très jeune qui évolue tous les jours, et ce, pour en améliorer les fonctionnalités, mais également pour résoudre les problèmes courants. Il existe déjà des axes importants d’améliorations en cours de développement. On appelle ça la DeFi 2.0.

L’un des axes majeurs de cette deuxième génération de la DeFi est la sécurité. Le développement d’assurances décentralisées compétentes ainsi que la possibilité de réaliser des emprunts sous-collatéralisés sont au cœur des discussions. Ce dernier ayant fait un grand bond en avant avec la présentation des « Soulbound tokens » par Vitalik Buterin fin-juillet 2022.

Le déchargement des blockchains saturées est par ailleurs un point majeur de cette nouvelle finance. En effet, des protocoles bénéficiant de la liquidité de plusieurs blockchains sont en cours de développement. C’est notamment le cas de Li Finance. En y ajoutant les solutions de layer 2, cela permettrait de retrouver des blockchains abordables et rapides, prêtes pour l’adoption de masse.

💡 Pour aller plus loin – Soulbound tokens (SBTs), l’avènement de la société décentralisée (DeSoc)

Sources graphiques : Figure 1 : DefiLlama ; Figure 2 : DappRadar ; Figure 3 : Coin98 ; Figure 4 : RektDatabase

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