France : l'AMF publie ses premières réflexions sur la finance décentralisée (DeFi)
L’Autorité des Marchés financiers (AMF) vient de publier un papier de discussion qui se penche sur le sujet de la finance décentralisée (DeFi). Quelles sont les pistes de régulation envisagées par le gendarme financier français et qu’est-ce que cela augure pour le secteur ?
L’AMF se penche sur le sujet de la DeFi
Alors qu’aux États-Unis une campagne de régulation très hostile a été lancée par la Securities and Exchange Commission (SEC), les autres territoires se penchent également sur le sujet. En France, c’est semble-t-il la finance décentralisée qui attire les regards des institutions et régulateurs. Au cours du week-end, le gouverneur de la Banque de France affirmait ainsi qu’il fallait mettre en place un « MiCA 2 » pour s’attaquer au secteur, résumant ainsi son positionnement : « même activité, même risque, même réglementation ».
C’est également l’expression qui est utilisée par l’Autorité des Marchés Financiers, qui livre ses réflexions cette semaine. Elle explique qu’elle « soutient une approche progressive et proportionnée », et invite les acteurs à livrer leur réflexion au sujet de la régulation. Son papier indique déjà quelques pistes envisagées, qui pourraient façonner le secteur dans les années à venir. Quelles sont-elles ?
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Ledger : la meilleure solution pour protéger vos cryptomonnaies 🔒Les réflexions de l’AMF sur la régulation d’un secteur particulier
L’AMF le rappelle, la nature même des protocoles DeFi rend leur approche réglementaire complexe, à commencer par leur définition. Comment en effet déterminer ce qui relève de la DeFi ou de la CeFi ? Pour l’AMF, cela pourrait reposer sur le degré de « permissivité » :
« Un critère permettant de déterminer ou non si une activité relève de la DeFi serait d’évaluer la nature permissionnée ou non d’une blockchain, en incluant une analyse de son “degré” de permissivité. Les critères à prendre en compte pourraient notamment être le nombre d’entités, d’individus ou d’utilisateurs pouvant contrôler l’activité sur le réseau. »
Autre point à prendre en compte : les smart contracts. Par nature, ceux-ci s’exécutent de manière automatique, et leur autonomie ne rime pas avec régulation, toujours selon l’AMF :
« La nature autonome et continue de leur fonctionnement peut contraster avec les aspects interventionnistes requis pour qu’une supervision soit établie (par exemple, pour forcer l’arrêt ou la reprise des opérations en cas de détection d’une irrégularité). »
Le mot-clé étant bien sûr « interventionniste ». L’AMF envisage de créer des mécanismes permettant l’interruption des opérations afin de protéger les utilisateurs en cas de problème… Mais est-on encore alors dans la définition de la DeFi qu’elle évoquait plus haut ?
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Une réglementation existante insuffisante selon l’AMF
C’est tout l’enjeu de la DeFi : celle-ci échappe par nature aux réglementations existantes. Et forcer des protocoles à adopter des mécanismes favorisant la régulation pourrait annuler l’intérêt même de leur existence. Un paradoxe que reconnaît l’AMF :
« Dans certains cas, certains aspects des activités proposées pourraient être encadrés par la réglementation existante, mais celle‐ci pourrait également s’avérer inadaptée, voire impossible à mettre en œuvre dans certains cas. »
Pour le gendarme financier français, le secteur de la DeFi se heurte aussi à une certaine opacité, et à un manque de documentation. Il envisage donc d’imposer des clarifications :
« Il pourrait être envisagé que les règles des smart contracts opérés par ces protocoles soient “traduites” dans un langage non technique, permettant leur lecture, leur revue et, le cas échéant, leur approbation par les organismes de régulation. »
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En ce qui concerne les organisations autonomes décentralisées (DAO), l’AMF se heurte – tout comme les autres régulateurs – à la nature même de ces entités. Évaluer le degré de contrôle des participants est une tâche ardue, d’autant plus que ce contrôle est parfois intangible. Une personne ou un groupe peuvent ainsi avoir une influence sur les décisions du collectif, sans pour autant avoir le contrôle d’aucun mécanisme. C’est donc un enjeu de démocratie, difficile à démêler pour les institutions de surveillance.
Pour s’en sortir, l’AMF envisage donc de juger de la participation des contributeurs d’une DAO en fonction de critères non tangibles :
« Le contrôle d’une DAO peut reposer sur des éléments factuels et induire une situation de contrôle “de fait” s’il existe un individu ou un groupe d’individus avec un niveau élevé de détention (sans majorité) et que les autres détenteurs sont disséminés ; ou une situation de contrôle “de droit” si un individu ou un groupe d’individus détiennent au moins la majorité des jetons de gouvernance. »
On le voit, le contrôle « de fait » est flou. Cela pourrait ouvrir la porte à des jugements subjectifs, qui ne sont pas idéaux quand il s’agit de régulation.
Ce papier de discussion de l’AMF est donc intéressant, car il éclaire les positionnements précaires des institutions de régulation. La DeFi résiste en effet à toute catégorisation hâtive, et démêler ce qui est « régulable » de ce qui ne l’est pas sera certainement un enjeu crucial des prochains mois.
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Source : AMF
Image : Albert Bergonzo via Wikimédia Commons (CC BY-SA 4.0)
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