Qu'est-ce qu'une IEO et comment y participer ?

Qu'est-ce qu'une IEO et comment y participer ?

Dans le monde financier traditionnel, les levées de fonds se font parfois sous la forme d'introduction en bourse, aussi appelées IPO pour Initial Public Offerings. Très réglementées, ces IPO sont souvent réservées aux professionnels. Avec l'apparition de Bitcoin, et surtout d'Ethereum, qui permettaient de programmer des échanges de valeur, la conception qu'on se fait de l'investissement a été chamboulée : ces protocoles décentralisés rendaient possibles les levées de fonds sans intermédiaire. Les jeunes pousses pouvaient alors se financer directement sur la chaîne de blocs, grâce à la prévente d'un jeton appelée ICO ou Initial Coin Offering, et tout un chacun pouvait participer à la levée de fonds à condition de posséder de la cryptomonnaie.

Cela a conduit à une explosion du nombre des crypto-actifs à partir de 2017, et à la bulle financière qui s'est ensuivie, à tel point que certains ont parlé de « folie des ICO ». Ces ICO ont encore lieu de manière régulière aujourd'hui en 2019, mais il semble qu'un nouveau mode de financement soit en train de prendre de l'ampleur : l'IEO, ou Initial Exchange Offering, qui n'est autre qu'une prévente de jetons réalisée sur une plateforme d'échange.

Les plateformes d'échange concentrent actuellement l'essentiel de l'activité économique de l'écosystème, et pour cause : la spéculation est toujours l'usage principal qui est fait des cryptomonnaies. En raison de ce rôle majeur, il semblait donc logique que des levées de fonds passent par leur intermédiaire, simplifiant par là le procédé des ICO de façon considérable.

Qu'est-ce qu'une levée de fonds par IEO ?

Une IEO, ou Initial Exchange Offering, est une levée de fonds se faisant par le biais d'une prévente de jetons sur une plateforme d'échange. Le terme est directement calqué sur le terme Initial Coin Offering (ICO), lui-même calqué sur Initial Public Offering (IPO).

Le principe est le suivant. Une entreprise cherche à se faire financer pour réaliser un projet. Pour cela, elle passe par l'intermédiaire d'une plateforme d'échange réglementée. Cette dernière émet un jeton (respectant le plus souvent le standard ERC20), que ses utilisateurs achètent à l'aide d'autres crypto-actifs ou de monnaies fiat. Le jeton émis est un jeton utilitaire qui aura un rôle au sein du futur service proposé par l'entreprise. Dans l'opération, la plateforme perçoit des frais, l'entreprise se finance, et les utilisateurs perçoivent un retour sur investissement si leur spéculation a été bonne.

IEO Fonctionnement

 

Tout comme pour les ICO, ces levées de fonds par IEO peuvent être plus ou moins rentables selon les projets. En revanche, il est possible que les projets les moins viables soient rejetés par les plateformes d'échange, qui ont une réputation à tenir auprès de leurs clients, ce qui est un bon point pour l'IEO.

Le BitTorrent Token (BTT) a été lancé le 3 février 2019 par une IEO effectuée sur Binance Launchpad, la plateforme de lancement de Binance. Cela fait suite au rachat de BitTorrent Inc., l'entreprise derrière le protocole du même nom, par la fondation TRON. Le jeton a été émis sur la chaîne de TRON et les investisseurs ont pu payer en Binance Coins (BNB) et en Tronix (TRX). Ce sont 7,2 millions de dollars qui ont ainsi été levés en moins de 15 minutes. Le retour sur investissement représente aujourd'hui un gain de 1000 % (valeur multipliée par 11).

Les IEO permettent également aux plateformes d'échange de se financer elles-mêmes grâce à l'investissement de leurs clients. Ce modèle copie un peu le concept du jeton BNB de Binance, qui permet de réduire les frais sur la plateforme, et fait tourner depuis peu l'échangeur semi-décentralisé Binance DEX. Ainsi, iFinex (le groupe derrière Bitfinex, Ethfinex et Tether) a lancé récemment son jeton, le LEO (« Unus Sed Leo »), via une prévente contre de l'USDT. Cette IEO a levé 1 milliard de dollars.

Notons que la plateforme d'échange Bitpanda Global Exchange souhaite réaliser la même chose le 9 juillet 2019, en émettant un jeton, le Bitpanda EcoSystem Token (BEST), et en le vendant à ses utilisateurs.

 

Pourquoi participer à une IEO ?

Tout comme l'ICO, le principe de l'IEO est de créer un token utilitaire sur une blockchain. Ce jeton est donc censé avoir une utilité au sein du service imaginé par la startup : il peut être le moyen de réaliser des transactions au sein d'une application mobile par exemple. Ou, si l'entreprise est une plateforme d'échange, le jeton peut servir à réduire les frais d'échange, à l'instar du BNB de Binance.

Quand on participe à une IEO, on spécule sur la valeur du jeton, valeur qui doit en dernier recours découler de son utilité. En principe, cet investissement est fait en fonction de l'usage futur imaginé. Comme pour tous les domaines naissants, il y a beaucoup de projets qui échouent et il est donc très risqué de participer à une IEO. Cependant, en faisant partie des premiers investisseurs, on peut dégager un profit considérable si le projet gagne en popularité, comme le prouvent les 1000 % de gain des participants à l'IEO du BTT.

De manière générale, les motivations pour participer à une IEO (et les risques sous-jacents) sont à peu près les mêmes que pour l'ICO : n'hésitez pas à lire notre guide sur le sujet si vous ne l'avez pas déjà fait.

Quels avantages et quels inconvénients par rapport à l'ICO ?

L'IEO diffère de l'ICO par le fait que c'est une plateforme d'échange qui va assurer la prévente de jetons, et pas un contrat autonome directement. Il s'agit d'un compromis entre le caractère ultra-régulé des IPO et le côté décentralisé des ICO. Cette différence apporte des bénéfices et des désavantages, aussi bien pour l'entreprise qui réalise l'IEO que pour les investisseurs.

Tout d'abord, l'entreprise profite de la visibilité et de la base d'utilisateurs de la plateforme, ce qui diminue son besoin de faire du marketing et de se faire connaître. De plus, à la suite de l'IEO, son jeton sera presque toujours listé sur la plateforme d'échange utilisée.

L'entreprise s'abstient également de réaliser le protocole de vérification d'identité (KYC) des investisseurs nécessaire à la légalité d'une levée de fonds dans beaucoup de pays : celui-ci est généralement déjà réalisé par la plateforme d'échange lors de l'inscription.

Bien sûr, c'est à double tranchant, car la plateforme d'échange a la possibilité de privilégier certains projets aux dépens d'autres, et peut être contrainte par le législateur à exiger des conditions drastiques pour organiser l'IEO. On retombe ainsi un peu dans les travers des IPO. Cependant, même si les IEO connaissent un succès grandissant, il est sûr que les ICO continueront d'avoir lieu : certaines entreprises « grises » ou ne souhaitant pas soumettre les investisseurs à une identification ne cesseront pas d'utiliser ce moyen pour lever des fonds.

Du côté des investisseurs, c'est l'accessibilité qui est mise à l'honneur avec les IEO. En effet, une ICO demande à l'utilisateur de recourir à des manipulations complexes pour interagir avec le contrat autonome sous-jacent. Dans le cas d'une ICO réglementée qui requiert de toute façon une vérification d'identité, on peut donc se demander si c'est justifié : ici l'IEO facilite l'investissement et les contraintes sont similaires. De plus, l'investissement n'aura pas forcément à se faire en éthers (ETH) ou dans une autre cryptomonnaie : il pourra aussi, dans certains cas, se faire en euros ou en dollars.

Un autre gros avantage pour l'investisseur est la confiance. Comme on l'a dit plus haut, puisque les plateformes d'échange se réservent le droit de sélectionner les projets qui postulent, on peut partir du principe que seuls les projets les plus viables seront listés. Cel dépend bien sûr de la politique de la plateforme : plus la plateforme sera réputée, plus on pourra supposer que le projet présenté tient la route.

Pour l'utilisateur, les IEO constituent néanmoins un sérieux retour en arrière, en lui imposant les normes d'identification liées au caractère financier de la chose. L'accessibilité se fait au détriment de la décentralisation.

On notera pour terminer que cette centralisation ne concerne que la distribution initiale du jeton, et que ce dernier, émis sur une chaîne de blocs, pourra être retiré de la plateforme pour servir dans le contexte d'une application décentralisée, à condition que les utilisateurs en fassent l'effort...

Comment participer à une IEO ?

Comme indiqué ci-dessus, l'un des avantages de l'IEO est l'accessibilité offerte à l'investisseur. Par conséquent, pour participer à une IEO, il vous faudra simplement utiliser la plateforme appropriée. Nul besoin de connaissances techniques, en dehors de celles nécessaires pour suivre le processus de vérification d'identité (KYC) de la plateforme. Si vous utilisez une plateforme d'échange, cette vérification aura peut-être déjà été faite. Dans le cas contraire, vous devrez vous y soumettre : pour participer à une IEO sur Binance Launchpad, il vous sera demandé de vous identifier, contrairement au trading sur la plateforme classique.

Les plateformes proposant des IEO sont nombreuses. On peut notamment citer :

  • Binance Launchpad : il s'agit de la première grosse plateforme à proposer ce type de service. Elle a accueilli l'IEO du BitTorrent token (BTT) le 3 février 2019.
  • Bittrex International : puisque Bittrex impose désormais de vérifier son identité, les IEO ont lieu au même endroit que le trading. L'IEO de Veriblock a été réalisée sur cette plateforme le 2 avril 2019.
  • Tokinex, pour les utilisateurs de Bitfinex et Ethfinex.
  • KuCoin Spotlight, liée à KuCoin.
  • Gate.io Startup.
  • OK Jumpstart, la plateforme de lancement de OKEx.
  • La plateforme chinoise BitMax.

Il existe des sites web recensant les IEO ayant lieu dans la crypto-sphère. Vous pouvez par exemple consulter la liste des ICO et des IEO de Cryptopotato qui est une mine d'informations.

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