Qu’est-ce que la science décentralisée (DeSci) ?

C’est quoi la science décentralisée (DeSci) ?

La science décentralisée (DeSci ou decentralized science) est un mouvement ayant pour objectif de moderniser la science traditionnelle et de fournir une infrastructure publique à part entière pour la recherche scientifique, la publication et le financement.

Concrètement, les outils mis à disposition par le Web3 que sont la blockchain, les smart contracts et les organisations autonomes décentralisées (DAO) entre autres, permettent d’envisager une science plus accessible et transparente.

Les partisans de la DeSci souhaitent mettre au point un environnement où chacun peut facilement partager son travail scientifique, ainsi qu'accéder et contribuer aux travaux des autres chercheurs. La science décentralisée s'efforce également de fournir des sources de financement plus diversifiées et d'offrir un modèle de recherche scientifique résistant à la censure.

💡Qu’est-ce que le Web3, cette version décentralisée d’Internet ?

Le financement de la recherche : le Web3 au service de l’efficacité

Les problèmes de la science traditionnelle

Le système actuel de financement de la recherche présente plusieurs lacunes qui en limitent l'efficacité. Les subventions publiques sont distribuées de manière très centralisée, ce qui expose le processus à de potentiels conflits d'intérêts.

En effet, les organismes de financement jouent un rôle crucial dans la décision d'accorder ou non des fonds aux projets de recherche, créant ainsi une vulnérabilité aux intérêts personnels des membres du jury et des organismes eux-mêmes.

Pour les chercheurs, obtenir des financements peut être une tâche fastidieuse, car cela nécessite de préparer de nombreux dossiers. Ces derniers doivent répondre aux exigences des processus bureaucratiques souvent longs et complexes. Ils incluent la recherche de sources de financement, la formulation d'un plan de recherche, la rédaction d'un projet de recherche, l'élaboration d'un budget détaillé, la préparation d'un échéancier et la soumission du dossier.

Enfin, le manque de financement public pour la recherche scientifique peut également contraindre les scientifiques de rechercher des financements privés ce qui peut les amener à s'engager dans des projets qui ne correspondent pas à leurs intérêts ou à ceux de la société.

Par exemple, il est courant que des entreprises financent des études dans le but de promouvoir l'utilisation de leurs produits. Cette pratique peut biaiser la perception de la science en tant que quête de vérité impartiale et peut susciter la méfiance des citoyens envers les résultats des recherches scientifiques.

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Les solutions apportées par la science décentralisée

Pour pallier ces inefficiences, la DeSci s’affirme comme une solution particulièrement intéressante. En effet, les technologies du Web3 que sont les DAO, les votes quadratiques et le financement rétroactif offrent de nouvelles perspectives pour le soutien de la recherche scientifique.

Une Organisation Autonome Décentralisée (DAO) est une entité collectivement gérée via la blockchain et qui œuvre à une mission commune. Dans le cas de le DeSci, le but d’une DAO est de financer des projets de recherche scientifique. Elle permet aussi de créer du lien entre les donateurs et les chercheurs, dans la mesure où ces derniers peuvent en toute transparence suivre les avancées du projet de recherche.

De nombreuses DAO dédiées à la science décentralisée ont d’ores et déjà vu le jour :

• AthenaDAO qui a pour but de financer la recherche sur la santé reproductive des femmes ;
• BioDAO qui se concentre sur le financement des startups biotechnologiques ;
• ou encore Antidote DAO pour la lutte contre le cancer.

En outre, d’autres mécanismes rendus possibles grâce à la blockchain peuvent être adossés aux DAO :

• Le don quadratique : il donne la priorité aux projets de recherche en fonction du nombre de personnes qui y ont contribué. Les fonds sont affectés à des projets qui bénéficient réellement à un large public, plutôt qu'à ceux qui n'ont que quelques riches apporteurs de capitaux. C’est ce que propose le protocole Gitcoin qui a permis de financer des projets de biens publics pour plus de 50 millions de dollars ;
• Le financement rétroactif : défendu par Vitalik Buterin, cofondateur de la blockchain Ethereum, il permet de créer des incitations pour des projets qui n’en ont pas naturellement (en particulier ceux dans la recherche scientifique). Il implique un vote décentralisé pour financer des projets ayant déjà prouvé leur valeur plutôt que de les financer sur l’espoir d’une potentielle valeur future ;
• La création d’un token : elle offre une source de financement pour la recherche ainsi que pour les coûts opérationnels, tout en servant de moyen de rétribution pour les chercheurs et les donateurs. Cette rémunération via un jeton encourage la participation dynamique et une démarche de collaboration. Enfin, le token peut aussi être un moyen de rémunérer les participants d’un potentiel hackathon organisé par la DAO.

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La publication scientifique, un monde qui manque de transparence 

Les problèmes de la science traditionnelle

Dans le monde universitaire, les processus d'évaluation par les pairs (peer review) sont gérés par des maisons d'édition universitaires qui comptent sur la gratuité du travail des chercheurs. De plus, les scientifiques doivent payer pour publier leurs recherches, et pire encore, il se peut qu'ils n'aient même pas accès à la publication puisque la majorité des revues universitaires en ligne sont payantes. Le besoin de transparence est crucial.

Malheureusement, la culture hyper concurrentielle qui y règne empêche souvent la collaboration entre scientifiques, alors que les défis auxquels nous faisons face nécessitent des approches scientifiques collaboratives.

Dans ce contexte, il est fréquent que les scientifiques aient tendance à ne montrer que les résultats positifs de leur recherche, ce qui peut mener à une vision incomplète de la réalité. Aux États-Unis, moins de 10% des données collectées par la recherche financée par des fonds publics sont publiées avec les articles scientifiques.

Il est donc primordial de mettre en place des mesures encourageant la transparence et la collaboration pour permettre aux scientifiques de partager leurs connaissances et l'ensemble de leurs résultats.

Les solutions apportées par la science décentralisée

Pour répondre à ces enjeux, l'approche décentralisée du Web3 ouvre la voie à un univers de publication scientifique plus équitable et transparent.

La solution peut être communautaire à l’image de Halogen. Cette plateforme vise à remplacer le monopole des revues scientifiques par un réseau auto-organisé de communautés scientifiques auto-suffisantes. La publication, la révision, la documentation et le financement se font tous au niveau communautaire.

Les NFT offrent eux aussi de belles perspectives pour la recherche scientifique. Au lieu de simplement publier des articles, les chercheurs ont la possibilité de créer et de posséder des NFT de leurs articles, qui peuvent ensuite être cités par leurs pairs.

Les évaluateurs donnent une note au document de recherche qui s'ajoute aux évaluations précédentes pour créer un « score de confiance » du NFT, visible publiquement.

Ce score global, associé aux subventions obtenues et autres activités, définit le score personnel de l'utilisateur. Ce score influence les évaluations de l'utilisateur sur d'autres documents et subventions.

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Conclusion sur la science décentralisée

L'adoption de la science décentralisée émerge comme une réponse pertinente aux défis auxquels la recherche scientifique traditionnelle fait face.

La science décentralisée offre l’espoir d’une recherche plus transparente, accessible et équitable qui permet de restaurer l'universalité de la science. Cette révolution du Web3 s’aligne avec la vision de Robert Oppenheimer : avec la DeSci, la proclamation de la vérité scientifique est soutenue par des mécanismes décentralisés.

Ainsi, comme le souligne Aleksandra Smilek, experte de la DeSci, « l’importance de créer des outils décentralisés pour améliorer notre société » est évidente, contribuant ainsi à façonner un avenir où la connaissance est partagée librement au bénéfice de tous.

Cependant, il y a encore du chemin à parcourir pour sa pleine adoption.

Les scientifiques doivent être sensibilisés et formés aux concepts du Web3 pour surmonter leur réticence face aux risques. De plus, une régulation juste est nécessaire, mais doit être réfléchie et adaptée selon les pays.

🔎 Vous souhaitez en savoir plus sur la science décentralisée ? Visionnez notre échange avec Aleksandra Smilek, experte du domaine :

Je découvre Bitcoin dans l’euphorie du bull run de 2021. Attiré tout d’abord par la spéculation, je la délaisse progressivement pour me tourner vers l’innovation sous-jacente. En parallèle de mes études, je rejoins Kryptosphere et prends un grand plaisir à démystifier la blockchain pour le plus grand nombre.

Émile Brémond

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