Les fonds des 4 500 membres de l'association dijonnaise RR Crypto « disparaissent » – Plus de 60 millions de dollars perdus ?
Invoquant une curieuse « réinitialisation » de son portefeuille, le PDG de l'association dijonnaise RR Crypto a annoncé aux 4 500 membres que leurs fonds ont tout bonnement disparu. Selon nos informations, le préjudice s'élèverait à plus de 60 millions de dollars. On fait le point sur la situation.
60 millions de dollars se volatilisent
« Savoir-faire - Écoute - Bienveillance ». Voici les 3 mots qui introduisent RR Crypto sur son site Web, une entité qui se présente comme une association française de services sur actifs numériques. Cette dernière propose un accompagnement personnalisé pour des projets d’investissement en lien avec les cryptomonnaies.
« Notre objectif ? Nous avons pour but de créer un véritable écosystème de services sur actifs numériques afin de le rendre accessible à tous, tout en minimisant les risques. Enfin une vraie opportunité d’investir judicieusement ! » peut-on lire sur la page LinkedIn de l’association.
Quelle ne fût pas la surprise des quelque 4 500 « membres » de l’association en apprenant le 20 juin 2021 que l’intégralité des fonds qu’ils avaient engagés dans RR Crypto s'est volatilisée.
D’après des informations recueillies par Cryptoast, le préjudice pour les 4 500 investisseurs s’élèverait à près de 60 millions de dollars. Zoom sur la courte, mais tumultueuse histoire de RR Crypto.
RR Crypto, c’est quoi exactement ?
Cette association, déclarée en février 2019, propose à ses membres de gérer leurs fonds en cryptomonnaies afin de les faire fructifier. Sur le forum Crypto.fr, l’un des membres de RR Crypto donne plus de détails sur le fonctionnement de l’association :
« Actuellement, j’ai investi dans une société qui s’appelle RR Crypto, rendement environ 10% mensuel, j’en suis très content, ils achètent différentes cryptos à prix bas puis les revendent, je ne m’occupe de rien, ils prennent 17% de commission sur mes bénéfices et tous les mois, j’ai mon relevé de compte sur ma boite e-mail, plutôt sympa. »
Jusqu'à 10% par mois de retour sur investissement ? Un tel taux paraît d’ores et déjà extrêmement suspect, d’autant plus que l’équipe de RR Crypto ne précise pas comment elle obtient de tels résultats.
Autre fait troublant, il est obligatoire pour exercer une telle activité en France de détenir le précieux statut PSAN, délivré par l’Autorité des marchés financiers (AMF).
Dans une interview accordée à la presse dijonnaise en février 2021, Vincent Ropiot, le PDG de l’association, explique que RR Crypto est en passe de se conformer à la règlementation en vigueur en France :
« Nous sommes actuellement en procédure pour devenir PSAN auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF), mais nous allons chercher un peu plus loin, car nous voulons obtenir l’agrément. »
Aucun dossier n'a été déposé auprès de l'AMF, ni pour obtention du PSAN, ni pour évoluer en fond commun de placement, confie une source proche du dossier à Cryptoast.
Bien que RR Crypto ne soit pas enregistrée auprès de l’AMF, il est fort probable que les investisseurs aient accordé leur confiance à l’association, car celle-ci était membre de l’Adan, une association qui œuvre pour développer l’industrie des cryptomonnaies en France. L’adhésion de RR Crypto à l’Adan lui a certainement offert une légitimité auprès des investisseurs lésés. Toutefois, l’Adan a confié sur Twitter que :
« Toute entreprise crypto peut adhérer à l’Adan. Cela ne présage pas du modèle économique ou du projet. Notre mission est de représenter les professionnels de l’écosystème et le statut de membre ne doit pas se confondre avec un label de confiance. »
Toute entreprise crypto peut adhérer à l’Adan. Cela ne présage pas du modèle économique ou du projet. Notre mission est de représenter les professionnels de l’écosystème et le statut de membre ne doit pas se confondre avec un label de confiance.
— Adan (@adan_asso) June 21, 2021
« Ils ont indiqué être partenaires avec l’ADAN ; c’est un terme fallacieux, ils n’étaient que membres. Être membre, ça signifie uniquement qu’ils exerçaient une activité dans le secteur crypto, rien de plus. Tout le monde peut avoir ce statut. Ce n’est en aucun cas un label, » confie Faustine Fleuret, présidente de l’ADAN.
L’intervention de Vincent Ropiot, PDG de RR Crypto
Le 20 juin 2021, Vincent Ropiot envoie aux membres de l’association un communiqué titré : « Important - État de RR Crypto », où il y explique qu’il a :
« [...] pris connaissance durant le mois de mars 2021 que le portefeuille de cryptoactifs ouvert sur la plateforme Binance, sur lequel l’ensemble des fonds confiés en gestion par nos clients sont conservés, a été réinitialisé. »
Ce dernier indique que le portefeuille aurait été « réinitialisé », sans donner davantage d’explications sur ce point pourtant crucial.
Vincent Ropiot affirme dans la suite de son message que les fonds ne seraient plus présents sur le portefeuille, et qu’il serait dans l’incapacité d’accéder à l’historique des transactions liées au portefeuille.
Le PDG de RR Crypto déclare ensuite avoir déposé une plainte auprès de la gendarmerie de Beaune le jeudi 17 juin 2021.
« [...] je suis à ce jour le seul et unique responsable de cette situation, » affirme-t-il après avoir dédouané de toute responsabilité l’intégralité des équipes de RR Crypto.
Selon nos informations, hormis l’équipe de direction, l’équipe aurait appris la nouvelle simultanément au mail envoyé aux investisseurs. Sous le choc, les membres tentent actuellement d’en savoir plus sur cette perte et de retrouver les mouvements du compte Binance.
« Le mail envoyé par Vincent Ropiot aux investisseurs indique que les comptes ont été réinitialisés en mars. Or, l’association a annoncé une perte de 4% lors du mois de mai, suite à la forte baisse des crypto-monnaies. Comment ont-ils pu subir une perte de 4% si les fonds avaient disparu ? De plus, sur les différents relevés entre avril et mai, certains actifs apparaissent d’autres disparaissent ; il y a donc eu une gestion active d’après ces relevés bien après la découverte du dit reset, alors que les traders ne passaient plus d’ordres depuis plusieurs mois”, indique une source proche du dossier.
Contactée par mail, la messagerie du directeur retourne un message de non-délivrance depuis ce matin. Les investisseurs commencent à regrouper leurs informations afin d’analyser leurs solutions de sortie de crise. L’équipe tente quant à elle de joindre les directeurs afin d’établir les points de défaillance et d’obtenir plus d’informations concernant la « réinitialisation » des comptes par Binance.
« Si la supercherie est avérée, les répercussions sur le secteur français risquent d'être importantes, » redoute un professionnel du secteur.
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Fort de café ! On n'arrête plus la bêtise humaine !