L’Afrique pourrait-elle développer une crypto-monnaie unique ?
L’Afrique doit-elle accélérer son processus d’intégration des crypto-monnaies ? C’est en tout cas l’avis de Jérôme Mathis et Daniel Ouedraogo, qui ont publié mardi 30 juillet un plaidoyer en faveur de ces dernières dans le journal Le Monde.
L’Afrique, un continent particulièrement friand de crypto-monnaie
Comme le rappelle la tribune, l’Afrique est un continent peu bancarisé par rapport à l’Europe. Et les crypto-monnaies sont parvenues à s’y faire une place : « Le continent africain fait preuve d’un engouement inouï pour le Bitcoin. Le Nigeria totalise à lui seul 8 % des transactions mondiales. Ce nouveau moyen de paiement gagne également du terrain dans d’autres pays, comme l’Afrique du Sud, l’Égypte, le Kenya et le Soudan. »
L’harmonisation monétaire est déjà un projet sur le continent : l’Union africaine a ainsi mis en place un projet de monnaie commune, planifié pour 2063. Mais les altcoins, qui se développent bien plus rapidement, pourraient bien venir remplir ce vide avant cette lointaine échéance. Selon Jérôme Mathis et Daniel Ouedraogo, c’est un enjeu clef pour le développement économique du continent : « L’intégration monétaire africaine permettrait de faciliter les échanges commerciaux, comme l’euro facilite les échanges au sein de la zone euro, et ainsi concourir au développement économique du continent. » Cette monnaie unique pourrait également favoriser la stabilité politique des pays africains.
Le Bitcoin, rempart contre l’inflation ?
Les inflations annuelles sont particulièrement hautes dans les pays d’Afrique, le Soudan du Sud a par exemple affiché une inflation dépassant les 500 % en 2016 et 2017. Face à cela, les altcoins et le Bitcoin (BTC) sont donc de plus en plus utilisés : « Le Bitcoin est adopté par les populations comme moyen d’assurance contre l’inflation galopante. La demande locale est parfois telle que son niveau de change s’en trouve fortement apprécié par rapport à son cours mondial » Les crypto-monnaies permettent également aux utilisateurs d’éviter d’avoir à s’acquitter de frais de transactions exorbitants lors de transferts d’un pays à l’autre.
Les deux économistes rappellent cependant que le Bitcoin a aussi ses défauts, notamment sa volatilité et les nombreuses arnaques qui se greffent sur son fonctionnement. Ils appellent donc au développement d’une blockchain alternative : « Les populations utilisent [le BTC] faute de mieux, mais restent en demande d’une cryptomonnaie plus stable et plus sécurisée. »
La tribune conclut en rappelant que l’innovation est par définition inarrêtable : « L’Afrique est en pleine mutation technologique et l’innovation ne se soucie guère de l’agenda des politiques. [...] Au risque de se laisser dépasser, il va leur falloir prendre position rapidement. » L’Afrique pourrait donc bien devenir un vrai incubateur pour les cryptos.