« Le Bitcoin a échoué comme projet monétaire alternatif » – Entretien avec Odile Laguerre-Lakomski, chercheuse au CRIISEA
En 2009, le Bitcoin (BTC) a été lancé comme une monnaie numérique, qui concurrencerait les actifs comme le dollar et l’euro. Mais plus de dix ans plus tard, la plus grande cryptomonnaie tend à être considérée comme une réserve de valeur ou un « or numérique » plutôt qu’un équivalent numérique des espèces. Un mal pour un bien ? Nous avons interrogé Odile Laguerre-Lakomsi, chercheuse au CRIISEA, pour évoquer l’épineuse question du statut de la reine des cryptomonnaies.
Cryptoast : On dit souvent que le Bitcoin est créé sur un modèle déflationniste. Est-ce une réalité ?
Il faut déjà revenir sur les bases du Bitcoin. On considère que la monnaie classique bancaire est hiérarchique, et fondamentalement il s’agit déjà d’une vision faussée. Cela montre que les pro-Bitcoin et ceux qui ont conçu les monnaies numériques étaient et sont encore des informaticiens, plus que des économistes ou des théoriciens de la monnaie. Ils se sont raccrochés aux théories mises notamment en avant par [l’économiste ndlr] Friedrich Hayek qui critiquait déjà dans les années 30 les monnaies bancaires comme étant inflationniste.
Mais à mon avis, ils n’ont pas vraiment creusé dans la théorie de Hayek et sont restés en surface sur l’argument principal. C’est-à-dire pour la résumer : il suffirait de supprimer le système bancaire et la banque centrale pour éliminer l’inflation. Dans la réalité, c’est plus complexe que cela.
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Le rôle des banques centrales dans le cadre de l’inflation est donc à mesurer selon vous ?
La principale mission des banques centrales, dans la période historique où nous vivons, est de faire un ciblage d’inflation. C’est-à-dire que leur objectif prioritaire est la lutte contre l’inflation, en essayant de contrôler l’offre de monnaie pour la contenir à certains niveaux. Que cela soit la banque centrale américaine ou la BCE, le ciblage de l’inflation permet en théorie de faire en sorte qu’on ait un niveau d’inflation inférieur ou égal à 2 %. Il n’est donc pas entièrement correct de dire que les monnaies classiques sont inflationnistes, tout du moins pour la période contemporaine. Je pense qu’il y a une grosse confusion dans la communauté crypto entre la notion d’inflation et la notion de valeur de la monnaie.
Comment considérer le Bitcoin dans ce cas ?
C’est une monnaie qui conserve sa valeur, mais [ses créateurs] ont conçu le Bitcoin davantage comme une marchandise que comme une monnaie : il peut donc effectivement être considéré comme une marchandise qui prend de la valeur. C’est quelque chose que l’on observe de manière très claire. S’il existe une demande qui augmente, en regard de l’offre disponible, cela alimente ce mécanisme.
C’est ce qui s’est fait quand les premières plateformes d’échange [de cryptomonnaies] ont été ouvertes aux alentours de 2011, on pouvait déjà échanger du dollar contre du Bitcoin. Mais cette prise de valeur est toujours relative par rapport au cours d’une autre monnaie, et donc des devises officielles. Il faut aussi noter l’effet d’entraînement. On l’a vu avec les « mèmes » qui ont généré beaucoup de volatilité une fois que le public s’y est intéressé.
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Bitcoin n’est donc pas un actif anti-inflation selon vous ?
La notion d’inflation se conçoit par rapport à une monnaie qui sert réellement pour les transactions. Si par exemple on parle d’inflation pour une monnaie comme le dollar, cela a un sens, parce que le dollar sert de moyen de paiement dans l’économie américaine. C’est-à-dire que tout le monde paie en dollar, tous les prix, les dettes, les créances, les services et les salaires sont exprimés en dollars. C’est la même chose pour l’euro.
Dès lors que vous disposez d’une monnaie pour les transactions, elle se confronte aux biens et services que vous achetez avec cette monnaie. C’est pour cela que quand on essaie de mesurer l’inflation dans une économie, on prend comme référence l’indice des prix à la consommation.
Ce qui ne peut pas être le cas pour Bitcoin, pour l’instant.
Exactement. Pour l’instant, je dis bien pour l’instant, cela n’a aucun sens parce que tant que ces monnaies ne permettent pas de constituer une zone de paiement dans laquelle on paierait tout en crypto, et où tous les prix seraient exprimés en Bitcoin par exemple, la notion d’inflation n’existe pas. Le Bitcoin sera un rempart contre l’inflation uniquement s’il devenait un moyen de paiement généralisé qui permettrait d’acheter un ensemble de biens et de services courants. Les créateurs du Bitcoin ont en réalité créé un type d’or numérique, car ils ont cherché à établir une monnaie qui ait les mêmes propriétés de rareté que l’or. Pour les autres types de blockchain, l’équivalent serait le burning de jetons en circulation.
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Le cours du Bitcoin est très corrélé aux actions : cela veut-il dire que la cryptomonnaie n’a pas encore réussi à se détacher de la finance « classique » ?
Malheureusement, le Bitcoin s’est surtout institutionnalisé par la finance. Pour l’instant, il a échoué comme projet monétaire alternatif, mais il a eu en revanche beaucoup de succès au niveau de la finance et comme actif financier, c’est-à-dire depuis environ 2017. Les crypto-actifs sont considérés comme des classes d’actifs dans lesquelles on peut investir et grâce auxquelles on peut avoir un retour sur investissement intéressant. Comme il y a une très forte volatilité, il y a aussi beaucoup de rendement.
Le Bitcoin et les cryptomonnaies ont ainsi été absorbés par cette logique financière qui est très prédominante dans notre capitalisme contemporain, et qui s’est installée à partir des années 1980. Nous sommes donc dominés par des investisseurs qui sont en permanence à la recherche de rendement élevé, et ce depuis la crise [des subprimes] de 2008.
Avec les politiques monétaires accommodantes des banques centrales, qui ont essayé de relancer la machine économique pour éviter la déflation, ainsi qu’une récession qui a suivi la crise financière, les banques centrales ont injecté beaucoup de liquidités dans le système financier. Elles ont aussi procédé à beaucoup de rachats massifs d’actifs traditionnels, ce qui a eu comme conséquences de faire baisser leur rentabilité, voire de la rendre complètement nulle. Les investisseurs ont donc été obligés de se tourner vers des classes d’actifs alternatives, dont le Bitcoin fait partie. D’autant plus qu’à partir de 2017, la Bourse de Chicago a envoyé un signal très positif au marché en ouvrant des services de trading spécialisés sur les cryptomonnaies. Les cryptomonnaies et le Bitcoin sont alors devenus des actifs financiers qui obéissent désormais à une logique spéculative typique de la logique financière à l’œuvre dans la période contemporaine.
Pourquoi le Bitcoin n’est-il pas parvenu à pleinement trouver sa place pour l’instant ?
Je dirais intuitivement que le Bitcoin est peut-être malheureusement arrivé un peu trop tôt. Je pense qu’il aurait fallu que le capitalisme financier s’effondre complètement, et qu’on bascule vers un autre type de modèle. Ainsi, le Bitcoin se serait naturellement positionné.
Cela dit, je pense quand même qu’il y a une lame de fond qui est en train de se former. Nous sommes en train de basculer vers un autre type de capitalisme, avec le développement massif d’Internet et du numérique. Mais nous sommes dans une phase où le capitalisme financier n’est pas encore mort, et malheureusement le Bitcoin est arrivé au moment où il fonctionne encore. Il a donc été absorbé en tant qu’actif classique, pour l’instant.
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Les investissements dans les crypto-monnaies sont risqués. Il n’existe pas de rendement élevé garanti, un produit présentant un potentiel de rendement élevé implique un risque élevé. Cette prise de risque doit être en adéquation avec votre projet, votre horizon de placement et votre capacité à perdre une partie de cette épargne. N’investissez pas si vous n’êtes pas prêt à perdre tout ou partie de votre capital
Beau ramassi de connerie ?
Vous auriez du lui conseiller de lire Bitcoin Standard ou aller faire un tour au Salvador.
Elle ne sait pas que les banques centrales sont des systèmes pyramidaux privé en dictature sur la terre et dont l'emprise esclavagie la terre les êtres et les hommes. Le bitcoin est très jeune, ce n'est pas en 10 ans qu'il va remplacer le dollar.
Le bitcoin est certainement plus vertueux, la bonne blague...
Chercheuse pour trouver aussi peu c'est dommage. 1-Satochi Nakamoto a lancé le BTC en pleine crise financière de 2008 où le système bancaire a une fois de plus trahit: une banque, qui est un "tiers de confiance", dont le métier est de protéger l'argent que les déposants lui confient, a fait faillite et clairement dit à ses clients, "désolé, votre argent s'est envolé". 2-Depuis, le BTC a prouvé que sa technologie de blockchain par authentification décentralisé et en plus en réglant le problème de la double dépense, peut facilement se substituer au système bancaire actuel, permettant des échanges commerciaux, et… Read more »